
Présente dans toutes les cultures depuis les temps les plus reculés, la vigne – ou vitis vinifera – a toujours été intimement liée à l’histoire et à la vie des hommes. Son fruit, le raisin, fut d’abord consommé comme aliment par les sociétés paléolithiques des bords de la Méditerranée, avant d’être utilisé pour la fabrication de boissons.
La culture de la vigne s’est ensuite répandue vers le sud, en Mésopotamie; elle atteint l’Égypte vers 3000 avant J.-C., puis la Grèce vers 2500 avant J.-C., comme le démontrent les nombreuses jarres découvertes par les archéologues, dont on sait qu’elles contenaient du vin grâce aux sceaux et aux étiquettes qui y sont toujours apposées.
A l’instar des moissons, les vendanges étaient l’occasion de grandes réjouissances, au cours desquelles se mêlaient allègrement religion et liesse populaire. Le raisin était foulé au pied, au son des flûtes ou des lyres, puis pressé dans de larges pressoirs. Parallèlement, des offrandes étaient faites aux dieux en remerciement des bonnes récoltes.
Dans la Rome antique, tout le cycle de fabrication du vin se déroulait entre deux fêtes symboliques dédiées au vin (la vie quotidienne des Anciens était rythmée par les rituels religieux, les fêtes et les jeux publics, au point qu’on ne dénombre que 55 jours ouvrables dans le calendrier romain … o tempora, o mores!): les vinalia priora, célébrées le 23 avril, pendant lesquelles les fûts remplis l’automne précédent étaient ouverts. Un prêtre répandait sur le sol une coupe de vin, offrant une libation à Jupiter devant le temple de Vénus. On faisait remonter cette fête au voeu prononcé par Enée de consacrer la vendange à Jupiter s’il parvenait à vaincre Turnus (Ovide, Fastes, IV, 879 – 896). Ce vin venait de la toute dernière vendange et personne ne devait le boire. Cette célébration était nommée la “fête du vin nouveau”. Et les vinalia rustica, célébrées le 19 août, qui inauguraient les vendanges; des agneaux étaient immolés en offrande à Jupiter avant que le prêtre ne coupe la première grappe.
Aujourd’hui, les vendanges restent un des événements majeurs de l’automne et ont conservé leur caractère festif. Des sites viticoles font même revivre chaque année les vinalia antiques, sous la forme d’une reconstitution historique grandeur nature jumelée à une approche archéologique. En effet, en se basant sur les écrits de l’agronome Columelle et du gastronome Apicius, tous deux célèbres au Ier siècle, des expérimentations ont été mises en place pour produire des vins romains selon la recette antique originale. Qu’il s’agisse du mulsum, du turriculae ou du carenum, plus de 200 plantes ont été dénombrées dans les différents procédés de vinification, sans compter les autres éléments qui entrent dans la composition de ces vins: l’eau de mer, la poudre de marbre, la poudre d’argile, la poix, la chaux ou le defrutum (sirop très concentré à partir de la cuisson de moût de raisin dans lequel sont incorporés des grenades, des coings et des herbes aromatiques). De quoi intimider les estomacs les plus sensibles…
Quant aux goûteurs aventureux, à vos agendas, une prochaine édition des Vinalia est déjà prévue pour septembre 2015.
Vinalia, Fête du vin et de la cuisine antique, St. Romain-en-Gal
ou encore:
Vendanges romaines au Mas des Tourelles, Beaucaire
Martine Bouilloux